Messe de la Nuit de Noël

Frère François-Dominique FORQUIN

Is. 9, 1-6 ; Tt. 2, 11-14 ; Lc. 2, 1-14

Frères et sœurs, moi qui suis lorrain, en cette nuit je peux penser aux odeurs de Noël chez moi. Cela sent le pain d’épices, la cannelle, le vin chaud… En effet, il n’y a pas que nos papilles qui sont sollicitées. Il nous faut aussi ouvrir nos narines.

Dans la crèche, ça sentait quoi ? Autour de la crèche cela sentait le fumier. Avec un âne, un bœuf, des moutons, ça sentait le fumier. Ça sentait mauvais. Et cet enfant qui venait de naître était entouré de ces odeurs.

Cet enfant va, à l’âge adulte, respirer  d’autres mauvaises odeurs : celle des publicains qui s’enrichissaient sur le dos des pauvres gens. Il va fréquenter des prostituées, des menteurs, des voleurs, ceux dont on pensait : ces fumiers de gens ! Mais on oublie que les plus belles fleurs fleurissent sur le fumier. Et cette odeur de fumier n’arrivera jamais à recouvrir la Bonne odeur de l’Évangile. Cette bonne odeur est celle de la dignité de chaque personne

Mais dans la crèche, ça sent encore quoi ? Çà sent l’animalité. Ça sent le bœuf et l’âne. Ici, il y a une référence à Isaïe qui dit que le bœuf et l’âne connaissent l’étable de leur maître. On peut penser à l’humanité captive avec ces bêtes attachées. Mais en entrant à Jérusalem, Jésus montera, un âne et même un ânon. Dans un autre moment, il chassera les animaux vendus comme offrande au Temple car c’est Lui  qui se donnera en sacrifice. Il libère du pouvoir,  du fric, du trafic, des magouilles pour rendre notre humanité à elle-même.

La crèche sent la liberté. Mais ça sent aussi la mort. Car nous sommes devant une petite vie si fragile. Et ce petit enfant dans ses langes sera un jour enveloppé dans un linceul. Il est déposé dans une mangeoire car IL se donnera à manger.

Ce soir, l’Éternel entre dans le temps. La mort peut surgir à tout moment. Jésus vient nous libérer à une autre dimension de notre vie. Il entre dans le temps pour nous faire entrer dans une autre dimension. C’est pour cela que nous disons dans le Notre Père : ne nous laisse pas entrer en tentation !  Dieu ne nous donne pas des  épreuves pour voir jusqu’où nous allons résister. Il ne nous soumet à rien, c’est Lui qui se soumet à nous, à notre condition humaine.

Noël est la fête d’un Dieu qui se fait proche de l’homme. Il se fait proche jusque dans sa mort. La crèche, ça sent la dignité,  la liberté retrouvée. Ce soir, sous le sapin, vous ne trouverez peut-être pas le dernier Chanel  ou le dernier Lancôme mais vous recevrez certainement le bon parfum de l’Évangile avec toutes ses saveurs.