homélie du 7e dimanche du TO, frère Bruno CADORE, OP

 

Rien ne peut y faire, pas même la compassion des disciples sans doute, ni même la compréhension de ce qui arrive à cet enfant  et qui peut-être s’inscrit dans un ensemble de convictions, plus culturelles ou plus religieuses  (J’aurais une histoire à vous raconter à ce propos, mais ce n’est pas le lieu ici…)

De la compassion, de la compassion humaine. Je ne sais si vous avez vu quelqu’un et particulièrement un enfant saisi de ces convulsions qu’on appelle idiopathiques, dont  on ne sait pas très bien d’où elles viennent, qui ravagent, paralysent ces enfants en les jetant à terre. Plus que tous les humains, les convulsions d’un enfant font peur parce que la personne semble s’échapper à elle-même, ne plus s’appartenir. Il semble que des forces venant d’ailleurs sont en train de la posséder, de la fracasser de la détruire, et peut-être de la faire mourir.

La compassion que l’on ressent humainement, le désir qui vient en l’homme de le sortir de là, de sortir de ce chemin de mort, de destruction,  d’annihilation, la compassion est forte et même si on entend dire autour que ça fait longtemps que ça arrive,  l’humain est celui qui, par compassion, pense : beaucoup ont essayé mais moi je vais y arriver. Par la force de la compassion, de la sympathie, de l’empathie  pour celui-là qui souffre et, enfin, cet enfant sera libéré et ses parents seront enfin heureux. Et puis on croit que ça va marcher.

Ça ne marche pas…

Et c’est là que Jésus fait œuvre de pédagogie.

La compassion humaine c’est très grand et c’est très beau.

L’empathie les uns pour les autres, c’est très grand et c’est très beau.

Mais cela ne manifeste aucune puissance, aucun pouvoir, aucune autorité d’un homme sur un autre homme, aucune supériorité qui justifierait de s’appuyer sur cette puissance un peu mystérieuse qui permettrait de prendre le pouvoir sur un autre humain ou sur son environnement. Rien de la bonté, de la grandeur d’un homme au  bénéfice d’un autre homme ne donnent pouvoir ou autorité sur un autre homme. Rien, absolument rien : même pas l’amour mutuel même pas l’amour fraternel, même pas le service rendu en communauté, même pas les services que nous pouvons nous rendre mutuellement ; RIEN de ce que l’homme est capable de faire de beau et de bon ne lui donne autorité sur d’autres hommes.

Mais alors, comment faire ?

Jésus dit : la compassion humaine : quel miracle lorsque l’humain qui la manifeste et qui l’offre, abandonne tout esprit, toute prétention de possession de sa capacité de bonté. Rien sauf la prière ne peut guérir cette convulsion. Rien de ce dont nous sommes capables, sauf à l’enraciner en Dieu ne peut vraiment réussir, redonner paix, redonner unité. Unité à la personne qu’on veut aider, unité dans l’humble fragilité entre cette personne aidée et celle ou celui qui aide, unité de tous ensemble en Dieu qui donne la vie et qui seul fait vivre.

Pédagogie de la bonté de Dieu. Un enracinement tel, qu’enraciné en lui, on abandonne toute fierté d’être bon.

Lundi 21 février 2022

7ème du temps per annum

Frère Bruno CADORE

Jc. 3, 13-18 ; Mc 9, 14-19