Homélie du 02 août 2018, Mgr P.RAFFIN, OP

« Le royaume des Cieux est encore comparable à un filet que l’on jette dans la mer, et qui ramène toutes sortes de poissons » lorsque Jésus appelait ses premiers apôtres, Simon-Pierre et André, ils étaient en train de jeter le filet dans la mer. Ils savaient qu’un beau coup de filet peut ramener des poissons de toutes sortes, bons ou mauvais. Ils connaissaient les gestes familiers que Jésus avait bien souvent observés : « Quand il est plein, on le tire sur le rivage, on s’assied, on ramasse dans des paniers ce qui est bon, et on rejette ce qui ne vaut rien ». Jésus sait que le filet ne ramène pas que des bons poissons : il est lancé en pleine mer et ramasse ce qui se présente. Le produit de la pêche est à l’image de la mer, d’une mer  vivante avec ses richesses et ses déchets, avec des poissons succulents et d’autres fades ou dangereux. Quand il invite les pêcheurs de la mer de Galilée à laisser leurs filets et à le suivre, Jésus leur propose un autre genre de pêche, devenir pêcheur d’hommes. Il sait mieux qu’eux que les pêcheurs d’hommes courent les mêmes risques que les pêcheurs en mer : ils n’ont aucune assurance sur ce qui va garnir leurs filets. Eux aussi ramènent : « toutes sortes de poissons » . C’est vrai pour le royaume des Cieux. C’est vrai pour l’Eglise, qui en est le signe et les prémices. Nous avons du mal à supporter les imperfections et les laideurs de l’Eglise parce qu’elles sont d’abord les nôtres. Si celles que nous constatons dans le monde nous découragent parfois, celles de l’Eglise nous indignent souvent. Il y a ainsi des membres de l’Eglise qui savent être pleins de miséricorde et de patience vis-à-vis de l’ivraie semée dans le champ du monde, mais qui deviennent purs et intransigeants pour les défauts de l’Eglise. Ils la trouvent, selon les cas, trop autoritaire ou trop laxiste, pas assez engagée ou pas assez fidèle. Parfois on oppose l’Eglise au Royaume, comme si celle-là était humaine, trop humaine, et le royaume parfait, idéal et divin ! Comme si on pouvait, en récusant l’Eglise, mieux défendre le royaume des Cieux !

C’est pourtant bien du royaume des Cieux dont Jésus parle lorsqu’il évoque le filet contenant toutes sortes de poissons. C’est bien du royaume des Cieux dont il parle lorsqu’il décrit le champ semé de bon grain et d’ivraie à la fois. Dans un cas comme dans l’autre, c’est à la fin des temps que se fera le tri, entre ce qui est bon et ce qui ne l’est pas. Pour l’heure, l’Eglise est composée d’hommes pêchés en pleine mer, l’Eglise les accepte tous, elle les appelle continuellement à la conversion, elle les nourrit de la parole de Dieu, les sanctifie avec les sacrements, tous n’accueillent pas ces propositions, mais l’Eglise ne les rejette pas pour autant. D’ailleurs, si nous faisons retour sur nous-mêmes, nous constatons assez vite qu’en chacun de nous le bon grain et l’ivraie sont inextricablement mêlés.

Quant au « scribe devenu disciple du royaume des Cieux », il peut être soit auditeur qui a compris l’enseignement de Jésus, soit l’évangéliste lui-même. Le trésor désigne soit l’enseignement traditionnel des scribes juifs renouvelés par la foi au Christ, soit la pensée de l’AT présenté ici par l’évangéliste comme la source des choses anciennes et nouvelles qu’il désire faire comprendre à sa communauté.

Le filet et le scribe Mt 13, 54-58