Homélie du 29e dimanche du TO, frère Pavel SYSSOEV, OP

Dimanche 21 octobre 2018

Servir. Jésus nous le propose comme une voie royale, comme une route de vie éternelle.

Gardons-nous de réduire ce commandement – servir- à une banalité de menus services rendus, à un petit jeu de gentillesse quotidienne – encore qu’elle soit si précieuse.

Pour prendre la vraie mesure de ce que « servir » signifie, le Christ oriente notre regard vers son propre mystère. Le Fils de l’Homme n’est pas venu pour être servi, mais pour servir et donner sa vie en rançon pour la multitude.

Chaque dimanche nous nous réunissons pour être servis par Lui. Il s’abaisse, lave nos fautes, il se livre en rançon pour la multitude. Il est Celui qui distribue le pain de la vie éternelle à son peuple ; plus encore, Il est ce pain même, celui qui descend du ciel et donne vie au monde.

Servir, c’est donc donner sa vie. Broyé par la souffrance, le Serviteur a plu au Seigneur. S’Il remet sa vie en sacrifice de réparation, Il verra une descendance, Il prolongera ses jours. Par Lui, ce qui plait au Seigneur réussira. Comme nous sommes loin ici de la gentillesse conventionnelle –s’Il remet sa vie en sacrifice. Il est le Serviteur du Seigneur parce qu’Il se livre sans réserve à son dessein de rédemption. Il s’abandonne et se dessaisit, devient l’esclave de tous. N’est-Il pas Celui qui passe si aisément à la toute dernière place ? Et c’est ainsi qu’Il mène sa descendance à la lumière.

Pouvez-vous boire la coupe que je vais boire, être baptisés du baptême dans lequel je vais être plongé ? Pouvons-nous descendre avec Lui dans les abîmes de Sa mission ? Donner sa vie en rançon pour la multitude.

C’est Sa gloire, Sa Seigneurie, Son  sacerdoce. En Jésus, le Fils de Dieu, nous avons le Grand Prêtre par excellence, Celui qui a traversé les cieux. Tenons donc ferme l’affirmation de notre foi. En quoi consiste le sacerdoce du Christ ? Il n’officie pas dans le Temple, Il n’immole pas les brebis et les boucs, Il n’offre pas l’encens devant un autel de pierre. C’est Sa propre vie qu’Il offre, son  propre sang qu’Il répand, c’est sa propre adoration qu’IL élève vers le Père. Père, que ta volonté soit faite. Je viens pour faire ta volonté ! Le Serviteur et le Prêtre. Prêtre parce que Serviteur. Celui qui est à Dieu. Celui qui fait de toute sa vie un acte d’adoration, de charité, un acte d’une majestueuse obéissance.

C’est de ce sacerdoce-là que nous sommes devenus participants. C’est dans ce sacerdoce-là que notre baptême nous a plongés. Offrir toute sa vie à Dieu. Elle est un don reçu de Lui, elle devient un don offert à Lui. Non pas de menus services, mais une vie de foi, d’espérance, de charité, une vie qui n’est qu’adoration, et culte, et service. Vous tous qui avez été baptisés en Christ, vous avez revêtus le Christ. Nous sommes revêtus de son sacerdoce, de son service et donc de sa seigneurie. Avançons donc avec assurance vers le trône de la grâce, pour obtenir miséricorde er recevoir, en temps voulu, la grâce de son secours.

La recevoir pour nous et pour nos proches. Pour nous et pour ceux que Dieu nous a confiés. Car la vie de foi que nous avons reçue n’est pas seulement pour nous, elle est pour tout homme. La vie d’intimité avec Dieu n’est pas seulement pour nous, mais pour tout homme. Le siège de gloire n’est pas seulement pour nous, à l’exclusion de tous les autres, mais pour la multitude que nul ne peut dénombrer. Le cœur qui porte auprès de Dieu le plus d’hommes, le cœur qui présente à Dieu le plus d’hommes, qui les relie à la miséricorde de Dieu, c’est celui-là qui est le plus proche de Dieu. Plus un cœur est ouvert aux multitudes, plus il est à l’image du Cœur du Christ.

Nous avons reçu cette vocation et cette mission : être des serviteurs dans l’Unique serviteur, être des prêtres dans l’Unique Prêtre, être des fils et des filles de Dieu dans le Fils Unique

qui n’est pas venu pour être servi

mais pour servir et donner sa vie en rançon pour la multitude.

Donner sa vie en rançon : qui peut boire à cette coupe s’il n’est pas porté par le Christ ? Qui peut servir de la sorte, hors de l’Unique vrai Serviteur ?

Is. 53, 10-11; Hb. 4, 14-16; Mc. 10, 35-45