Homélie du dimanche 27 décembre 2020, pour la Sainte Famille, frère Sébastien PERDRIX, op

 

« Tu as voulu, Seigneur, que la Sainte Famille nous soit donnée en exemple… » C’est ainsi
qu’a commencé notre messe. Je dois vous avouer qu’il n’est pas aisé de prêcher sur la Sainte Famille.
Non pas tant parce qu’il s’agirait d’un mystère de la foi, mais en raison du temps où nous nous
trouvons. A une époque où la culture dominante aime à déconstruire les stéréotypes et les
institutions, il ne reste plus grand chose de la conception dite traditionnelle de la famille. On parle
volontiers de la pluralité des modèles familiaux et non plus d’un modèle en soi. A l’heure de la
fragmentation et de la recomposition des « familles », et dans une société qui se veut de moins en
moins normative, on comprend le désir d’intégrer et de donner sa place à toutes les déclinaisons
possibles de ce qu’on appelle désormais les familles.
Force est de reconnaître que la Sainte Famille résiste à toutes les déconstructions. La Sainte
Famille, c’est une femme, un homme et un enfant. C’est un couple marié devant Dieu. Un couple de
parent qui a accueilli en son sein le don de la vie. Notre culture occidentale pourrait trouver cela
profondément réducteur, voir même offensant. Mais c’est cette famille que Dieu a choisi de nous
donner en exemple.
On entend déjà les esprits forts et les mauvaises langues se rirent de cette famille. Pas si
traditionnelle que cela votre sainte Famille. Un père qui n’en est pas un, tout juste un père adoptif à
qui Dieu a un peu forcé la main. Un enfant conçu « mystérieusement » ou la première PMA de
l’histoire. Une conception divinement assistée… Certains chroniqueurs radios ont même fait le lien
avec la GPA en faisant de Marie une mère porteuse d’un enfant qui ne serait vraiment pas le sien.
En bien, mes soeurs, ces ricaneurs n’ont peut-être pas tout-à-fait tort. Il y a un peu de vrai
dans ces boutades. Joseph n’est pas le père biologique de l’Enfant Jésus. Mais en accueillant l’enfant et
sa mère, il est devenu vraiment son père. Car être père ne se réduit pas à l’acte pro-créatif. Etre père,
c’est aussi assurer la longue mission d’éducation de l’enfant et vivre au jour le jour le mystère de la
fidélité conjugale pour maintenir cet écosystème protecteur qu’est un foyer uni.
Quant au mode de conception de l’humanité de Jésus, Verbe de Dieu, il tient en effet du
miracle et de l’intervention d’un tiers, Dieu en l’occurence. Mais contrairement aux techniques de
procréation, il n’y a eu aucune manipulation, aucune fabrication. Marie s’est fait terre d’accueil pour
le Verbe de Dieu et le Verbe de Dieu a reçu de Marie un corps et une humanité semblables à la nôtre.
L’action de Dieu n’a pas fait violence à la nature de la Vierge. Et bien que son mode soit unique et
miraculeux, cette conception nous rappelle que toute conception humaine tient aussi du miracle. Si
l’homme et la femme donnent de leur humanité à leur enfant, ils ne sont en rien à l’origine de leur
âme immortelle. Elle est directement infusée par Dieu.
Enfin, cette gestation de l’Enfant Dieu est d’une certaine manière une gestation pour autrui,
comme toute grossesse à vrai dire. On ne fait pas un enfant pour se faire plaisir. L’enfant n’est jamais
un du, mais toujours de l’ordre du don. Tout d’abord, un don reçu d’en haut. C’est ce que manifeste le
rite de la présentation au temple. Il convient de rendre à Dieu ce qui est à Dieu. Ensuite, un don pour
l’enfant. Les parents lui font don de leur humanité et du cadre protecteur de leur foyer pour que
l’enfant puisse s’épanouir et un jour les quitter pour vivre sa vocation. A Nazareth nous dit l’Evangile,
« L’enfant, lui, grandissait et se fortifiait, rempli de sagesse… » Il a pu le faire car Marie et Joseph ont
donné de leur temps, de leur attention et de leur amour. Enfin, un don pour le monde. En accueillant
une vie et en l’éduquant, les parents permettent à une nouvelle personne de prendre petit-à-petit sa
place dans la société pour l’enrichir de ses dons et ses fragilités. Ainsi, nul n’est parent pour soi, mais
toujours pour un autre et des autres. Ceci est vrai au plus au point pour Jésus. Sa vie est une vie
donnée pour tous. C’est pour nous les hommes et pour notre Salut que le Verbe, la vie s’est faite chair.
Marie et Joseph ne sont pas pour rien dans ce don de Jésus au monde. Ils ne l’ont jamais tenu captif.
En le consacrant dès sa naissance, ils redonnaient à Dieu celui qu’ils avaient reçu de Lui. Ils
permettaient ainsi au Christ de se consacrer pleinement à notre salut.

Dimanche de la sainte famille – Dax 2020