Homélie pour l’Épiphanie, frère Eric de Clermont-Tonnerre, OP

 

 

Ils n’étaient peut-être pas trois ! Dans l’histoire de l’iconographie chrétienne, ils furent deux, quatre, parfois huit et même douze.

Ils n’étaient sans doute pas rois ils ne s’appelaient sûrement pas Melchior, Gaspard et Balthazar.

D’où venaient-ils ? Si cette question  nous intéresse,  sont beaucoup plus intéressantes les questions suivantes : Que cherchaient-ils ? Et : où allaient-ils ?

Ce n’était pas des magiciens comme il y en avait eu en Égypte autour de Pharaon, au temps de Moïse et de l’Exode. C’était plutôt des chercheurs, chercheurs de sens, chercheurs de Dieu, qui sait ? Comme de vrais chercheurs, ils savent qu’ils ne savent rien ou pas grand-chose et que pour découvrir le sens profond de ce monde, de l’existence humaine il faut, dans l’humilité, se laisser guider !

Ce qui importe pour eux ce n’est pas leur propre science mais ce qu’ils peuvent apprendre des autres, dans les rencontres, dans le dialogue. Et ils sont prêts à se déplacer pour cela.

Mais ils se sont trompés. Ce n’est pas à Jérusalem qu’il fallait aller. Ils y ont perdu l’étoile qui les guidait. Celle-ci ne brille plus, ne brillera plus, tant qu’ils ne se seront pa remis en route pour Bethléem.

A Jérusalem agitée d’inquiétude, voici Hérode et les grands prêtres et les scribes réunis en un conseil de crise, en un conseil de guerre.

A Bethléem, voici la naissance toute simple d’un enfant et autour de lui une étrange compagnie d’animaux domestique, de bergers louches en un magnifique concert d’amour, de louange et d’espérance.

A Bethléem, la conspiration  de la vie, de la joie, de la louange.

A Jérusalem le complot de la peur et de la mort puisque bientôt Hérode va ordonner de faire mourir les enfants d’Israël.

Au seuil de l’Évangile, Matthieu démine le grand conflit qui conduira Jésus à la croix et révèle le grand amour qui conduira celui-ci à donner  sa vie. Du berceau au tombeau, il n’y a qu’un pas. C’est la même histoire qui travers la vie de Jésus et qui déchire notre monde et notre actualité.

A Jérusalem, la cité privée d’étoile, l’histoire des hommes continue de s’écouler, cette histoire sombre fermée sur ses certitudes, sur ses savoirs et ses pouvoirs animée par ses peurs, ses jalousies et ses haines.

A Bethléem, l’étoile du jour nouveau cachée dans la fragilité, la faiblesse, cette lumière discrète qui fait de chaque cœur, de chaque visage qui l’accueille une lumière pour les autres.

A Jérusalem, les puissants et les religions bâtissent des murs de séparation et fomentent des déclarations de guerre.

A Bethléem les nations, les couleurs, les races, les générations cherchent la vérité pour la vénérer et la servir.

Avons-nous choisi notre camp, notre lieu, frères et sœurs : la conspiration de la vie ou le complot de la mort.

A leur retour de Bethléem, les Mages évitèrent la Jérusalem du roi et des grands prêtres.

Un jour, cependant, Jésus prendra résolument la route de Jérusalem pour affronter le mal et le péché et pour affirmer par le don de sa vie que le mal, le péché, la mort n’ont pas le dernier mot.

Il fera disparaître les murs de la haine qui excluent et séparent pour faire entrer dans la cité à venir tous les chercheurs du vrai Dieu, hommes et femmes, de toute langue, race, peuples.

Aujourd’hui le Seigneur Jésus se manifeste comme roi et comme sauveur, non pas seulement des croyants que nous sommes, mais de tous les pauvres et les petits de ce monde, de tous les chercheurs de Dieu d’où qu’ils viennent. C’est pourquoi il n’y a qu’une chose à faire : aller à Bethléem, y ouvrir des crèches, les laisser ouvertes pour tous ceux qui veulent, y accueillir la lumière de leurs questions, de leur recherche et leur faire connaître la vraie lumière cachée dans nos ténèbres.

Oui, une seule chose à faire : allumer ces foyers de lumière et de vie, de silence, d’accueil et de louange.

Où les hommes et les femmes de tous les horizons, riches et pauvres pourront offrir :           l’or de leur foi,

l’encens de leur amour,

la myrrhe de leur espérance.

Dimanche 3 janvier 2021

Épiphanie du Seigneur

Frère Éric de CLERMONT-TONNERRE

Is. 60, 1-6 ; Ep .3, 2-3a. 5-6 ; Mt. 2, 1-12