Homélie pour l’Épiphanie, frère François-Régis DELCOURT, OP

 

Gaspard, Melchior, Balthazar, nos trois bons mages d’Orient ont vu dans le ciel une étoile se lever. Leur curiosité les a piqués au vif. Leur décision est prise, partir à la rencontre du roi des juifs. À leur tour, ils se sont levés, et ont suivis cette étoile afin de voir jusqu’où elle les mènerait.

Et l’étoile les conduit à Jérusalem où les mages entrevoient un premier roi juif, cet Hérode. Il peut bien être bouleversé celui-là. Comment les mages peuvent avoir le toupet de lui demander à lui où est le roi des juifs qui vient de naître ? C’est lui, Hérode, le roi des juifs. Il ne vient pas de naître. Et la crainte l’envahit. Y aurait-il un autre roi juif que moi ? Que me disent-ils ces mages ? Ils se sont trompés. Et s’ils disaient vrai. Et en effet, et en plus, ils enfoncent le clou en leur disant leur désir de se prosterner devant ce nouveau-né. Les mages, dotés d’un flair avisé, sont d’autant plus étonnés qu’Hérode n’en ait pas entendu parler et soit lui-même si surpris de cette nouvelle naissance. C’est lui qui aurait dû être prévenu en premier. Et en retour, lui aurait dû prévenir les pays voisins de cet enfantement, de se réjouir de la venue de cet enfant et de se prosterner devant cet enfant. C’est lui qui est juif. Les mages, eux, ne sont que des païens.

Hérode a de réelles raisons d’être bouleversé. Ce vieux renard s’interroge, il sort de sa tanière, convoque les savants de l’époque et les questionne. Où doit-il naître le Christ ? Et les grands prêtres et les scribes lui répondent : de Bethléem, sortira un chef, le berger du peuple Israël. Comment se peut-il qu’un autre roi ait vu le jour alors qu’Hérode est lui-même, en personne, le roi. Comment se fait-il qu’Hérode n’ait pas été informé de sa naissance ? Et si les mages disaient vrai. Et si le messie tant attendu était maintenant là.  Et la peur de perdre sa place et d’être détrôné le submerge. Hérode n’est clairement pas bouleversé d’émotion et d’allégresse de la venue de cet enfant annoncé comme le messie. Son cœur ressent une terrible anxiété car si cela est vrai alors cette naissance vient tout renverser et tout bousculer. Car si Jésus devient le chef, le berger alors les conséquences pour Hérode et sa famille sont dramatiques. Il perd son trône, son pouvoir, sa puissance. Et lui n’aura plus d’emprise car sa volonté de puissance sera réduite à néant. À la vue de cette grande perte, la perfidie s’éveille en Hérode et, avec elle, les mauvaises intentions d’aller, soi-disant, se prosterner devant lui.

Les mages venus d’orient reprennent leur chemin et vont auprès de Marie, Joseph et Jésus. Comme les bergers, ils trouvent Jésus, emmailloté. En entrant dans la maison, ils se réjouissent. En le voyant, ils tombent à ses pieds et se prosternent. En l’adorant, ils leur offrent leurs présents. Hérode, les grands prêtres et les scribes n’ont pas suivi les mages afin de voir, se prosterner et offrir de présents à Jésus. Ils auraient pu choisir d’y aller avec les mages ? La venue et la présence des mages auprès de ce nouveau-né est bien l’annonce que Jésus n’est pas que le roi, le chef et le berger du peuple d’Israël mais celui du monde entier et de toutes les nations d’orient et d’occident. Le salut n’est pas réservé à une élite mais offert à tous les hommes de tous les temps et de toutes les cultures, à tout homme de bonne volonté qui se laisse illuminer et guider par l’étoile scintillante du ciel et qui vient de Dieu. Ainsi, s’ouvre définitivement une nouvelle ère.

En ces temps compliqués de l’Église, prions Dieu : Donne-nous la foi des mages et continue d’ouvrir les yeux des païens. Et ensemble, précipitons-nous et suivons ton étoile en vue de voir, croire et reconnaître en Jésus, le messie et sauveur de tous les hommes.

Dimanche 2 janvier 2022

Épiphanie du Seigneur

Frère François-Régis DELCOURT

Is. 60, 1-6 ; Eph 3, 2-3a. 5-6 ; Mt. 2, 1-12