homélie pour la fête de saint Dominique, par le frère Benoît VANDEPUTTE, op

 

 

Monseigneur, très cher Frère Pierre

Mes bien chères sœurs, chers amis.

Que faut-il de nos jours pour faire un saint ? Immédiatement, vous pensez à la sage procédure mise en place au cours des siècles par l’Eglise. Le plus ancien  procès de canonisation dont on possède des pièces, date de 1181, nous dit-on : un saint ermite nommé Galgano. Trois points sont déclarés essentiels, dorénavant

1 : la vox populi ou réputation de sainteté ne suffit plus.

2 : s’y ajoutent les vertus du candidat

3 : et les miracles.

On pourrait y ajouter une saine doctrine ou substituer à tout cela, le martyre en haine de la foi. La dernière modification du processus date de 1983, avec saint Jean-Paul II et sa Constitution  apostolique : Divinis perfectionis Magister.

Alors nous pourrions nous attacher à chercher ces points chez notre Père saint Dominique.

En fait, à la lecture de l’histoire récente de notre Ordre et de ses maîtres depuis 1983 (entrée dans l’Ordre de votre frère), je voudrais vous proposer cinq points :

Pourquoi ?

Écoutons ce que nous dit Frère Augustin Laffay dans le tout récent : Dominique et sa mission, paru l’an passé : La raison d’être de la vie de saint Dominique, la mission de l’ordre des prêcheurs, c’est donc la prédication  de l’enseignement évangélique en réponse au commandement du Seigneur : Allez donc, de toutes les nations faites  des disciples, les baptisant au Nom du Père et du Fils et du Saint Esprit et leur apprenant à observer tout ce que je vous ai prescrit

Alors…quels sont ces éléments de consanguinité que nous allons pouvoir hériter de nos frères : Damian Byrne

Albert Nolan

Timothy Radcliffe

Carlos Alfonso Aspiroz Costa

Et Bruno Cadoré.

Nous ferons grâce à frère Gérard, toujours en charge.

* Chez Damian Byrne, j’aime à me souvenir de l’homme granitique qu’il était

1er critère de sainteté dominicaine.

Un frère tempéré, abstient même, toujours égal d’humeur mais qui n’imposait  rien des rigueurs qu’il s’imposait à lui-même. Je pense à l’abstinence d’alcool qu’il tenait par vœu personnel comme un témoignage et une offrande peut-être pour l’Irlandais qu’il était.

Un frère comme un roc, mais en plus discret.

Cf. le lit de saint Dominique et ses décisions inébranlables une fois prises.

Qualité n° 1 : la sagesse du gouvernement.

Albert Nolan. Maître d’un jour, qui démissionna le lendemain de son élection.. Il ne pouvait quitter le travail patient de justice de justice (dans une Afrique du Sud ravagée par la haine, la lutte pour l’égalité de tous…)

* chez Timothy Radcliffe, nous ne retiendrons pas sa plume, son éloquence, ses origines aristocratiques comme Dominique, même son amour de la Bible, car il est bibliste, ni sa francophilie bien agréable.

Mais sa jovialité. Britannique et amateur Holzes p…comme il se doit, il tient plus de Falstaff que de Macbeth !

Qualité n°2 : la jovialité donc ou pour le dire autrement :vivre. Il n’y a pas de triste saint.

3ème qualité. On aurait pu penser que la qualité allait être plus difficile à trouver chez notre canoniste argentin  devenu évêque : Frère Carlos…

Pas du tout, frère Carlos n’était pas social, il était espiègle !  Deux anecdotes :

* A peine élu, il pose avec un chien dalmatien, entouré des frères. Un chien racé noir et blanc, pour des frères de race blancs et noirs !

* En visite canonique à Paris, il embrasse comme du bon pain le Cardinal Vingt-Trois en arrivant dans son bureau. Le Cardinal ne s’y attendait pas… Mais dès lors, les échanges pouvaient de situer sur un autre registre que celui d’une audience compassée !

L’espièglerie de saint Dominique et dans la sainteté, c’est la légèreté dans ce qui est grave.

Non pas l’irrespect de la futilité mais une légèreté fraternelle qui allège ce qui serait trop difficile à affronter.

4ème  qualité.  Faire les choses sérieusement sans se prendre au sérieux (conseil du philosophe Chesterton).

Enfin.     Notre frère Bruno.

Évangile selon saint Matthieu. C’est l’évangile préféré de saint Dominique qui nous donnera la quatrième et dernière qualité d’un saint pour notre temps dur et menaçant. Nous l’avons écouté ce matin.

Doux et humble de cœur.

Pensons simplement à sa voix et laissons-là  résonner dans notre tête.

5ème qualité.

Alors oui, on se fabrique toujours un peu le type de saint que l’on aime, le type de sainteté qui vous fait vibrer.

Pas quand on nous dit de saint Dominique qu’il aimait tout le monde et que tout le monde l’aimait, imaginez un frère

* solide

*juste

* jovial

* espiègle

* et doux et humble de cœur.

Ce n’est déjà pas mal

Imaginez un  témoin avec ces qualités pour notre époque inquiète et sombre

C’est même très bien

C’est tout le mal ( !) que nous pouvons nous souhaiter les uns aux autres !

 

Solennité de Saint Dominique notre Père

Frère Benoît VANDEPUTTE

Is. 52, 7-10; Mt. 28, 16-20