homélie du 22e dimanche du TO par le frère Jean GIANG, op

En méditant ce passage de l’évangile, je me disais que, malgré la discussion de Jésus avec les Pharisiens et les scribes, on ne peut pas laisser tomber pour le moment les gestes barrières dont le lavage des mains qui est fortement recommandé. Si une discussion se passait dans la situation actuelle, Jésus ne gagnerait pas ! Certes, se laver les mains avant le repas implique dans l’habitude des gens normaux à l’époque de Jésus la question sanitaire, mais la raison, au fond, se trouve sur le plan  religieux, c’est-à-dire qu’il s’agit de la question de la pureté et de l’impureté.

Nous voyons que dans la vie quotidienne, on ne dit guère qu’une chose est pure ou impure, et encore beaucoup moins, qu’une personne est pure ou impure. Or, si cette catégorie survient dans le langage ordinaire, il s’agit d’une attitude morale. Un jugement concernant la pureté ou l’impureté d’une chose ou d’une personne sous le regard de Dieu, ou dit autrement, dans la perspective d’une alliance avec Dieu, un tel jugement qualifie la dignité d’une chose ou d’une personne.

Une chose ou une personne déclarée impure implique un jugement de non-appartenance au cadre de la relation avec Dieu. D’une certaine manière, la situation est pareille à quelqu’un dont le test Covid est positif. Une quarantaine lui est imposée. Elle est considérée hors du cadre commun. C’est un exemple un peu moins convenable mais pour montrer que, dans la communauté juive à cette époque le cadre commun n’est pas le Code civil mais l’alliance avec  Dieu. : C’est la relation entre le peuple juif et ce Dieu de l’Alliance qui oriente tous les jugements religieux.

Jésus ne peut pas sortir de ce cadre sans porter atteinte à l’habitude commune. L’évangile de Marc nous prévient que l’attitude de Jésus provoque la surveillance des cadres religieux : les pharisiens et les scribes. Ceux–ci  viennent de Jérusalem pour scruter et , éventuellement interroger Jésus. Ce qui est curieux et ironique, c’est que la motivation  de ceux-ci n’est pas totalement religieuse,  c’est-à-dire qu’il ne s’agit pas d’un souci pour le culte, mais d’une influence populaire menacée par la conduite de cet homme Jésus. En effet, le groupe des pharisiens a beaucoup plus d’influence dans la masse des gens que les sadducéens qui sont principalement des prêtres. Sur la pureté rituelle, les pharisiens ont élargi cette pratique dans plusieurs choses.

L’évangile de Marc nous donne quelques exemples comme le lavage de coupes et de plats d’étain. Or, pour Jésus, le point d’attaque n’est pas la question du nombre de ces pratiques, mais la fait qu’on abuse Dieu en inventant des rites, en le traitant comme une marionnette dans la main des dirigeants religieux. Alors Jésus déclare d’abord : ce qui est extérieur ne peut pas rendre l’homme impur. Ce qui rend l’homme impur, c’est ce qui sort de l’intérieur de l’homme.

Nous voyons que l’évangéliste donne son interprétation dans quelques versets plus loin ; dans ces versets, l’intention de Jésus est de considérer comme purs tous les aliments. Si nous avons le temps, le livre des Lévites nous laisse une liste des aliments purs et impurs à consulter ! Pourtant, ce qui nous intéresse ici, c’est de voir comment Jésus rétablit l’ordre des choses. La tradition de la Bible juive a montré dans la passé, sa lutte contre l’implication de Dieu dans un rite. L’exemple en est le refus du Dieu d’Abraham au sacrifice d’Isaac. Le Dieu d’Israël est un autre que les dieux parce qu’il n’est pas impliqué dans les rites humains. Or Jésus montre dans l’habituelle de la pureté rituelle qu’on fait impliquer Dieu par des jugements de pur ou d’impur d’une chose ou d’une personne. Pourtant Dieu n’est pas concerné par ce rite  pour être soumis à un jugement humain. Pur ou impur, c’est l’attitude d’abord de l’homme qui doit en être responsable.. En étant responsable de soi-même, l’homme est responsable de sa pureté ou impureté devant Dieu. La maturité religieuse nous invite à surmonter l’intermédiaire des rites pour être présents à Dieu en pleine responsabilité  de ce que nous avons fait et de ce que nous voulons faire.. C’est l’attitude des adultes qui se comportent avec leurs parents en osant dialoguer avec eux sur la vie et sur l’avenir de cette vie. Sans aucun doute, Jésus nous invite à nous mettre dans cette position de personnes majeures.

L’esprit de l’évangile ne nous permet pas de confondre la bonté du Seigneur avec  l’esprit malin. L’attitude religieuse nous demande de bien choisir, comme nous dit le livre du Deutéronome, le bien ou le mal, servir Dieu ou servir notre propre idéologie. Ce choix ne suffirait pas en soi sans la pratique. Saint Jacques dans sa lettre a bien insisté  sur cet aspect à ses lecteurs : ne pas servir Dieu dans l’illusion ou dans la théorie, nous avons toujours des frères et des sœurs à servir.

Ce n’est que dans cet esprit de personnes majeures que nous ne devenons pas des « fidèle »s des rites mais des  pratiquants  du message qui nous libère et qui nous invite à libérer les autres.

Dimanche 29 août 2021

22ème per annum – Année B

Frère Jean GIANG

Dt. 4 1-2.6-8 ; Jc. 1,17-18. 21b-22.27